Le traité de libre-échange qui se discute entre l’Union européenne et les Etats-Unis (TTIP) arrive sur les bancs du Parlement bruxellois. La majorité ne va pas assez loin pour mettre un coup d’arrêt à ce traité mortifère.

Samedi dernier, des milliers de personnes ont manifesté dans de nombreux pays du monde, dont plus de 2 000 à Bruxelles, pour s’opposer aux accords de libre-échange (TTIP : UE-USA, CETA : UE-Canada, TiSA : Accord sur le commerce des services, etc.) qui menacent nos normes sociales, environnementales et sanitaires, mais aussi le caractère démocratique de nos sociétés.

Le seul horizon de ces traités : un grand marché. Ne nous y trompons pas, l’ADN même de ces traités est la mise en concurrence et le nivellement vers le bas de toutes les protections qui ont été acquises par les organisations syndicales, environnementales et démocratiques. L’essence de ces traités vise uniquement à garantir les profits et les parts de marché des multinationales européennes et américaines à grands coups de poulets au chlore, de bœufs aux hormones, d’OGM et de mise en concurrence des travailleurs américains et européens. Il n’y a rien de bon pour les peuples dans ces traités. Et rien de bon non plus pour notre planète avec, entre autres, la porte ouverte à l’exploitation du gaz de schiste.

L’enjeu démocratique est également de taille. En effet, le TTIP prévoit que les multinationales auront non seulement des leviers législatifs directs au sein de l’organe du Conseil de coopération réglementaire (qui pourra s’opposer à tout projet parlementaire qui serait contraire au commerce), mais aussi qu’elles pourront traîner les Etats devant des tribunaux privés lorsqu’elles jugent leurs intérêts menacés. Ces dispositifs sont déjà une réalité dans le CETA dont le texte est désormais complètement connu. Il s’agit donc de transférer toujours plus de pouvoir aux multinationales. Un vrai hold-up démocratique.

Mais les mobilisations montrent que les jeux ne sont pas faits. Loin de là. Le CETA et le TTIP pourraient aller rejoindre d’autres traités avortés tels que l’AMI (Accord multilatéral sur l’investissement) ou l’ACTA (Accord commercial anti-contrefaçon). Suite aux pressions populaires, l’opposition au traité a grandi aussi dans les cercles politiques. Tant mieux. Ainsi, vendredi dernier, lorsque l’Alliance D19-20, regroupant de nombreux acteurs syndicaux et associatifs, a interpellé différents partis politiques (cdH-ECOLO/Groen-FDF-PS-PTB*PVDA-SPa), ces derniers ont tous annoncé qu’ils s’opposeraient au TTIP et au CETA dans leur état actuel.

Ce lundi, une résolution demandant la suspension des négociations du TTIP a été adoptée en Commission du Parlement wallon. C’est un pas en avant et une preuve concrète que la mobilisation citoyenne peut influencer les positions. Nous pensons que nous pouvons aller encore plus loin à Bruxelles. En effet, ce 24 avril, la majorité bruxelloise soumet au vote une proposition de résolution sur le TTIP. Point positif, elle rejette les tribunaux privés. Pour le reste, elle se limite à un catalogue de préoccupations sans exigence forte. D’autres amendements et résolutions proposaient d’aller plus loin. Nous estimons que la résolution proposée actuellement par la majorité bruxelloise est trop faible : elle ne demande ni le rejet du traité ni l’arrêt des négociations en cours. Elle est en deçà des enjeux auxquels nous sommes confrontés avec ce traité. C’est la logique qui anime ce traité qui doit être rejetée.

Voilà pourquoi nous appelons aujourd’hui publiquement tou.te.s les député.es bruxellois.es à voter les amendements appelant au rejet de ces traités et au refus de ratifier le CETA et déclarant Bruxelles “zone hors-TTIP”. Une initiative déjà approuvée dans de nombreuses communes et localités en Europe et en Belgique (Liège, Tournai, etc.). Des calculs tactiques ou partisans ne peuvent conduire à capituler. Au besoin, ensemble, PS, Cdh, ECOLO, PTB*PVDA, sp.a, Groen, peuvent, via leur vote, mettre un coup d’arrêt à ce traité mortifère. Sans même compter le FDF, qui a, lui aussi, annoncé son opposition au traité ce vendredi et dans certaines communes.

Face aux enjeux cruciaux liés à ce traité, il n’y a pas de petits jeux qui comptent. Il faut être clair dès maintenant. Quel meilleur signal dans le combat pour le rejet de ces traités que de voir la capitale de l’Union européenne se déclarer zone hors-TTIP ? C’est pour cela que nous faisons cet appel aujourd’hui et que nous serons présents ce vendredi 24 avril à 13 heures devant le Parlement bruxellois aux côtés des mouvements citoyens et organisations qui refusent ces traités antidémocratiques.

Une opinion d’Anne-Françoise Theunissen, présidente du MOC Bruxelles, Philippe Van Muylder, FGTB Bruxelles, et Philippe Vansnick, CSC Bruxelles.

Avec le soutien des députés bruxellois : Bruno De Lille, Mathilde El Bakri et Zoé Genot.

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